La Vengeance du wombat (K. Cook)

ON AIME RIRE – Qui a peur de Kenneth Cook ? Pas vous ? Vous avez tort. En apparence absurdes, déjantées et improbables, ses nouvelles sont étonnamment addictives. SI vous lisez un seul de ses courts récits, vous êtes perdu(e) ! La dépendance est quasi instantanée. Kenneth Cook, c’est de l’héroïne littéraire pure. Car au cœur de l’outback sévit une délinquance animalière insoupçonnée. Le quokka est un meurtrier en puissance, le kangourou une petite frappe ingrate, le koala un tueur en série et tous risquent de vous faire mourir… de rire. Bref, si vous ouvrez un recueil de Kenneth Cook, vos zygomatiques vont être sérieusement mis à l’épreuve. Agélastes (du préfixe privatif grec « a » et de « grelos » rire) et autres esprits chagrins s’abstenir ! Pour parcourir La Vengeance du wonbat, il faut être un pro du rire (pas un simple amateur) et affronter tous les périls de l’hilarité ; mais personne n’a jamais dit que lire était une occupation innocente et sans danger !

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A PROPOS DE L’HISTOIRE – Vous êtes un(e) baroudeur(euse) en pantoufles ? Le narrateur de La Vengeance du wombat vous donne rendez-vous en plein cœur du bush australien. Dépaysement garanti. Dans ces grandes étendues assoiffées et torrides, où le thermomètre flirte régulièrement avec les 40°, notre anti-héros multiplie les rencontres improbables : wombat vindicatif, kangourou ingrat, quokka agressif, Aborigènes roublards ou amateurs de paris surréalistes… De charybde en scylla, où plutôt de coins paumés de l’outback en bars très « couleur locale », le narrateur s’attire avec génie et constance… des ennuis ! C’est absurde, drôle et irrésistible !

Lira ou lira pas ?

Ce livre est pour vous si :

  • vous aimez rire ! Et comme, dans la grande bibliothèque du monde, les livres drôles sont loin d’être les plus représentés, lorsque l’on tombe sur un Kenneth Cook, on n’en lâche plus une page.
  • « Non, non, aujourd’hui, je ne veux pas aller au boulot. » Un café bien corsé et une nouvelle de La Vengeance du wombat devraient vous remettre sur pied.
  • l’Australie version « outback » vous attire. Oubliez Sydney et sa modernité, Kenneth Cook « n’a rien d’autre à offrir que de la poussière, du bush, du rire et de la sueur ». C’est déjà beaucoup !

« Je m’étais toujours imaginé en héros macho (il me manque seulement l’héroïsme et le machisme) […] »

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En route pour le bush !

D’autant plus qu’avec Kenneth Cook « rire » c’est aussi « découvrir » et « apprendre ». A travers ses nouvelles, qui sont autant d’étapes sur les pistes du bush australien, l’auteur brosse un portrait sensible et parfaitement documenté d’un outback qu’il n’a cessé de sillonner. Entre deux situations improbables, on apprend qu’un koala attaqué par un dingo s’agrippe au ventre de son agresseur ou que l’Ile de Rottnest (nid de rats) doit son nom aux quokkas qui la peuplent et que les Hollandais avaient pris pour des rats.

Dans ce zoo improbable, figurent aussi des espèces à deux pattes autrement plus dangereuses que les espèces à quatre pattes, tels ces universitaires et autres anthropologues, parfaitement inconscients des réalités de l’outback ! Car derrière le rire, la critique n’est jamais loin… Quant aux habitants du cru, ils font également figures d’espèces à part. Dans le bush et les villes paumées d’Australie, on boit (beaucoup), on trafique (encore plus) et l’on parie (sans modération) ! Entre agacement et affection, Kenneth Cook porte un regard réaliste sur son pays et ses habitants. Comme Balzac, il écrit pour ne pas juger.

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Cherchez l’erreur

Reste que l’être le plus incongru qui sillonne ces espaces désertiques est sans nul doute le narrateur de La Vengeance du wombat. Tout au long de ces 14 nouvelles, on se demande pourquoi un homme d’âge moyen, de 100 kg, allergique au sport et aux émotions fortes se promène au milieu de nulle part et… surtout des ennuis. Car, partout où il passe, cet écrivain que l’on reconnaît rarement, dont le courage est pour le moins aléatoire, et qui cache mal sa générosité et son humanisme, s’ingénie à se fourrer dans des situations inextricables. Du Kenneth Cook tout craché me direz-vous ! Car entre le narrateur et l’auteur, la frontière est fragile… d’autant plus Kenneth Cook a affirmé à plusieurs reprises que toutes ses aventures du bush étaient véridiques… à moins que cette affirmation ne vienne de son jumeau de papier… !

Le courage n’est pas toujours où l’on croit

Comme tous les clowns, Kenneth Cook a l’élégance de rire au lieu de pleurer. Si toutes ses nouvelles sont solaires, il arrive que la comédie et le grotesque flirtent dangereusement avec la tragédie, qu’un pari tourne mal, qu’une grenade explose ou qu’une pelle plantée au milieu d’un lagon fasse office de monument funéraire. La pauvreté, la bêtise et la solitude ne sont jamais loin mais des nouvelles amusantes peuvent réenchanter la vie. Car rire c’est avant tout avoir le courage de vivre. Alors que Kenneth Cook effectuait la promotion de La Vengeance du wombat, il est décédé à 57 ans d’une crise cardiaque foudroyante alors qu’il campait dans ce bush qu’il aimait à en rire et en mourir.

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La Vengeance du wombat – Kenneth Cook – Dates d’édition : Australie (1987) – France, autrement (février 2010) – Mon édition : autrement (19 mai 2021) – 256 pages

Anecdote


Ecrivain
aux 1000 vies

Il y a quelque chose de balzacien en Kenneth Cook (1929 – 1987). Comme Balzac, il a, avec génie, multiplié les expériences désastreuses (ou non) dès qu’il mettait le nez hors de ses livres. Son CV laisse songeur : tentative de création avortée d’un parti politique, création réussie de la première ferme à papillons d’Australie, lancement d’une entreprise de production cinématographique pour lutter contre la suprématie d’Hollywood (et oui, rien que ça !). Sans compter qu’il a été technicien de laboratoire, journaliste, réalisateur de documentaires, exploitant de cabanes à bateaux et s’est farouchement opposé à la guerre du Vietnam. Son amour pour la faune et la flore l’a aussi amené à adopter des positions écologiques assez peu en accord avec l’esprit de son temps. Bref ! La vie n’était pas assez grande pour Kenneth Cook, il devait nécessairement devenir écrivain !
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2 commentaires

  1. L’affiche ! A mourir de rire 😂 à la façon de la mésaventure vécue par l’auteur avec cet animal redoutable 😈. Une fois de plus, j’ai beaucoup apprécié ta chronique, tellement juste.

    Les vacances étant finies, à quand la prochaine ?

    • Tremblons 😱😅. Le wombat n’a pas encore été retrouvé et court, libre et redoutable, dans toutes les librairies et les bibliothèques de France ! Je suis sûre qu’il va bientôt faire d’autres victimes que l’on retrouvera « tordues » de rire 🤣 dans les salles d’attente, les trains et les A320 !!!

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